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ASSOCIATION DES AVOCATS PRATICIENS DES PROCÉDURES ET DE L'EXÉCUTION

lettre d'informations n°4 - avril 2020

CONSEIL D'ADMINISTRATION DE CANNES

Celui-ci devait avoir lieu le 20 mars dernier, avec une organisation de mains de Maître de Michel DRAILLARD, puissance invitante, aidée de ses voisins proches antibois et niçois ; malheureusement ce déplacement a dû être annulé pour cause de Coronavirus et de confinement. Le conseil a pu toutefois se tenir en télé conférence « ZOOM ».
Le prochain conseil, qui devait se tenir en Lombardie le 22 mai, a d’ores et déjà été annulé pour les mêmes raisons… en espérant toutefois que la pandémie en cours soit sur son déclin à cette date !
Prochain conseil : … le 15 mai, vraisemblablement encore en visioconférence.

FORMATION TARIF

Celle-ci a dû être annulée également ; il a même été envisagé de la faire en télé conférence mais cela n’a pas paru suffisamment « participatif ». Elle sera programmée pour la rentrée.

POINT SUR LES COTISATIONS

Depuis le début de l’année 2020, nous avons encaissé 28.125 € au titre des cotisations (incluant toutefois des cotisations 2019 réglées en retard).
Cette somme se décompose en 3 cotisations honoraires à 25 € soit 75 €, 186 cotisations normales à 150 € soit 27.900 €, et 1 cotisation membre bienfaiteur à 150 €. Or le fichier AAPPE comporte 414 adhérents, dont 12 membres d’honneur exonérés de cotisation. Donc au 19 mars, 213 adhérents n’ont pas encore réglé leur cotisation 2020. Le conseil a donc décidé de se résoudre à envoyer aux défaillants des années antérieures une lettre de rappel leur signalant qu’à défaut ils seraient retirés de l’annuaire et de l’accès au site pour les recherches de doctrine, d’avis et de jurisprudence, avant radiation éventuelle.

COLLOQUE PROCEDURE CIVILE : Le sujet est inévitable en cette année 2020 !

Il aura lieu le 11 décembre prochain, à Paris, à la maison du Barreau, et sera consacré à la réforme de la Procédure Civile, ou AUX réformes pourrait-on dire ! et pourrait se développer autour des thèmes suivants :
  • la saisine de la juridiction (incluant les règlements préalables et amiables)
  • la représentation
  • la mise en état (incluant la mise en état participative)
  • la procédure accélérée au fond
  • les exceptions
  • les moyens de défense
  • l’exécution provisoire
La commission colloque chargée de la préparation du colloque a prévu d’affiner son plan, de finaliser ses thèmes et développements et le choix de ses intervenants extérieurs, avec la participation acquise de Mr Arnaud Cermolacce, professeur agrégée des Universités, professeur à l’Université de Metz et à la Faculté Libre de droit de Paris, avocat au barreau de Paris.

COLLOQUE SUR LE CAUTIONNEMENT


Les textes que vous attendez tous, sur « LE CAUTIONNEMENT NOUVEAU ARRIVE » issus du colloque qui s’est tenu le 18 octobre 2019 à Marseille, sont en cours de publication et devraient vous être adressés… dès que la situation de confinement se sera enfin évaporée !

ORDONNANCES "CORONAVIRUS" DU MINISTERE DE LA JUSTICE, Publiées au Journal Officiel le 26 mars 2020


- ORDONNANCE PORTANT ADAPTATION DES RÈGLES APPLICABLES AUX JURIDICTIONS DE L’ORDRE JUDICIAIRE STATUANT EN MATIÈRE NON PÉNALE ET AUX CONTRATS DE SYNDIC DE COPROPRIÉTÉ
Lire l’ordonnance : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755577&dateTexte=&categorieLi en=id

- ORDONNANCE RELATIVE A LA PROROGATION DES DÉLAIS ÉCHUS PENDANT LA PÉRIODE D’URGENCE SANITAIRE ET À L’ADAPTATION DES PROCÉDURES PENDANT CETTE MÊME PÉRIODE
Lire l’ordonnance : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755644&dateTexte= &categorieLien=id

- ORDONNANCE PORTANT ADAPTATION DES RÈGLES APPLICABLES DEVANT LES JURIDICTIONS DE L’ORDRE ADMINISTRATIF
Lire l’ordonnance : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755608&dateTexte=&categorieLi en=id

- ORDONNANCE PORTANT ADAPTATION DES RÈGLES APPLICABLES DEVANT LES JURIDICTIONS PÉNALES
Lire l’ordonnance : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755529&dateTexte=&categorieLi en=id

LA PROCEDURE DE SAISIE IMMOBILIERE A L'AUNE DE L'ORDONNANCE N° 2020-304 DU 25 MARS 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété


L’ordonnance « moratoire de procédure » était attendue par tous les praticiens de la matière depuis qu’a été décrété l’état d’urgence sanitaire (leus).

En réalité, pourquoi faire simple lorsqu’on peut faire compliqué, surtout dans une situation pourtant déjà bien alambiquée et ce sont en réalité vingt-cinq ordonnances qui ont été publiées au journal officiel le 26 mars 2020.

Deux ordonnances intéressent la procédure de saisie immobilière :
  • L’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété,
  • L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période,
L’interprétation de ces deux seuls textes a donné à notre dernier « past » Président le sentiment d’affronter un « belluaire »... un gladiateur qui a affronté un fauve…( ndlr)

Un principe est posé à l’article 1 I de l’ordonnance n° 2020-306 qui précise que :

I. ‒ Pour l’ensemble des délais de procédure le principe posé est le suivant :
Tous les délais prescrits par la loi ou le règlement, quelle que soit la sanction de leur non-respect, seront réputés avoir été faits à temps s’ils ont été effectués dans le délai légalement imparti, à l’expiration du délai d’un mois suivant la fin de leus (1), dans la limite de deux mois.
La réponse est dans les mots : le délai légalement imparti est celui imposé par la loi ou le règlement, ce qui n’inclut pas expressément l’ordonnance, sauf que le gouvernement a été habilité par voie d’ordonnance laquelle a valeur de Loi !
Si tel est bien le cas, le délai à prendre en considération n’est pas le délai de la procédure concernée mais celui de l’article 1 de l’ordonnance n° 2020-306.
Il s’agit donc d’une paralysie des délais pendant toute la durée du leus, augmentée d’un mois, avec ensuite la nécessité d’effectuer la diligence procédurale dans le délai légalement imparti, le tout dans la limite de deux mois, même si le délai légal imparti prévoit un délai plus long. Difficile de faire plus simple n’est-ce pas ?

II. - Mais à tout principe sa dérogation
Ainsi, le II de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-304 dispose que :
« 1° Les délais de procédure applicables devant le juge des libertés et de la détention et devant le premier président de la cour d'appel saisi d'un appel formé contre les décisions de ce juge courent selon les règles législatives et réglementaires qui leur sont applicables ;
2° Les délais de procédure applicables devant les juridictions pour enfants sont adaptés dans les conditions prévues par le chapitre III du présent titre ;
3° Les délais mentionnés aux articles L. 311-1 à L. 322-14 et R. 311-1 à R. 322-72 du code des procédures civiles d'exécution sont suspendus pendant la période mentionnée à l'article 1er ».

Il y a donc trois exceptions au principe général posé au I de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-304 qui lui-même renvoie aux dispositions de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 et, hélas, l’une d’elles concerne la procédure de saisie immobilière.

Les raisons de cette exclusion restent mystérieuses et inexplicables ; pourtant ne s’agit-il pas de la procédure civile d’exécution considérée comme la plus complexe, celle dans laquelle il est permis d’énumérer, a minima, six délais prescrits à peine de caducité (article R. 311-11 du code des procédures civiles d’exécution) et celle dont les délais sont les plus variés, citons certains d’entre eux, pêle-mêle, sans que cette énumération ne soit exhaustive :
  • vingt-quatre heures (article R. 321-1, dernier alinéa du code des procédures civiles d’exécution),
  • trois jours (R. 322-52),
  • cinq jours (R. 322-6, R. 322-10),
  • huit jours (R. 322-1 et R. 322-19 par renvoi à 917 du code de procédure civile),
  • dix jours (R. 322-51, R. 322-19 par renvoi à 905-1 du code de procédure civile),
  • quinze jours (R. 322-19),
  • un mois (R. 322-13),
  • un et trois mois (R. 322-4 dernier alinéa),
  • un et deux mois (R. 322-31),
  • deux mois (R. 321-6 et R. 322-4, R. 322-12, R. 322-56),
  • deux et quatre mois (R. 322-22, R. 322-26, R. 322-53),
  • deux ans (R. 321-20).
Et pour cette procédure, d’apparence si amphigourique, le texte ne prévoit pas la paralysie encadrée des délais… que nenni, trop simple. Il prévoit… la suspension des délais !

Pour mémoire, la suspension d’un délai en arrête temporairement le cours sans effacer le délai déjà couru alors qu’en cas d'interruption, un nouveau délai recommence à courir à compter de la date de l'acte interruptif.

La suspension se distingue donc de l'interruption qui fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien.

Or, la suspension des délais, dans une période où tous les cabinets vont reprendre peu à peu leur activité en ayant à gérer une durée encore inconnue d’inertie totale ou quasi-totale, va générer un travail considérable avec la nécessité d’effectuer dans tous les dossiers des calculs du temps déjà écoulé avant la suspension, quand dans le même temps il faudra remettre le cabinet en route.

Ainsi, puisque les délais de la procédure de saisie immobilière sont suspendus, il appartiendra à tous les praticiens (avocats et juges) concernés d’effectuer, pour chaque procédure, la computation de tous les délais déjà écoulés jusqu’au 12 mars, pour ensuite pouvoir déterminer avec précisions le laps de temps qu’il leur restera à compter de la cessation de leus pour : publier leur commandement, le dénoncer à l’époux non propriétaire, faire signifier l’assignation à l’audience d’orientation, dénoncer le commandement aux créanciers inscrits, déposer son cahier des conditions de vente, déclarer la créance, faire paraître ses publicités, former surenchère, la dénoncer, etc.

On peut donc raisonnablement conseiller aux praticiens, dans la situation où cela sera rendu possible par le texte et le bon vouloir de chacun (article 8 de l’ordonnance n° 2020-304), d’effectuer leurs actes pendant la période du leus pour éviter autant que possible l’étranglement lors de la reprise.

Une autre question se pose, tout aussi inexplicable, pourquoi l’article 2 II 3° ne vise que les textes relatifs à la procédure de saisies immobilières (les délais mentionnés aux articles L. 311-1 à L. 322-14 et R. 311-1 à R. 322-72 du code des procédures civiles d'exécution) et omet ceux relatifs à la distribution du prix (articles L. 331-1 à L. 331-L. 334-1 et R. 331-1 à R. 334-3 du code des procédures civiles d’exécution). S’agit-il d’un simple oubli ?

Pourtant la Cour de cassation n’avait-elle précisé que la saisie immobilière et la distribution du prix étaient les deux phases d’une même procédure (Cour de cassation, avis n° 0080003P, 15 mai 2008) ?

Pourquoi un régime différent ?

Toujours est-il que la distribution, pourtant l’une des deux phases de la même procédure, obéira au régime de l’article 2 I de l’ordonnance n° 2020-304, et les actes qui devront être accomplis dans cette procédure seront réputés avoir été effectués à temps, s’ils le sont dans le délai légalement imparti à l’expiration du délai d’un mois suivant la cessation de leus, … dans la limite de deux mois.

Et le délai de 6 mois pour procéder à la distribution ? Pas concerné !

°°°°°

Puisqu’il nous faudra jongler, évoquons un rêveur jongleur « …j’avais beau faire, la septième balle se dérobait toujours à mes efforts. Le chef-d’œuvre demeurait inaccessible, éternellement latent, éternellement pressenti mais toujours hors de portée. La maîtrise se refusait toujours. Je tendais toute ma volonté, je faisais appel à toute mon agilité, à toute ma rapidité, les balles lancées en l’air, se succédaient avec précision, mais la septième balle à peine lancée, tout l’édifice s’écroulait (…) la dernière balle est restée à jamais hors d’atteinte (…). Ce fut seulement aux abords de ma quarantième année, après avoir longuement erré parmi les chefs-d’œuvre, que peu à peu la vérité se fit en moi, et que je compris que la dernière balle n’existait pas... » (Romain Gary, Romains et récits I, La promesse de l’aube, bibliothèque de la Pléiade, page 702).

Alors jonglons en sachant par avance que ce sera difficile.



avec l’aimable autorisation de Frédéric KIEFFER, le 26 mars 2020




(1)… « l’état d’urgence sanitaire »…

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